L’émondage et la taille des arbres n’est pas un acte médical comme l'élagage. Sa pratique ne consiste donc pas à couper les branches mortes, en dépérissement, opprimées, blessées, porteuses de pathologies, et celles qui pourraient compromettre une saine architecture de l'arbre dans le futur.

De plus, son action n’augmente pas non plus la vigueur des sujets élagués, pas plus qu’elle ne stimule positivement leurs différentes fonctions vitales, comme la croissance des tissus vivants, la photosynthèse, la respiration et la résistance aux perturbations biotiques et abiotiques.

Par opposition à  l'élagage, l’émondage se traduit par le retrait des branches qui sont nuisibles pour l’homme, et non pour l'arbre. Trop souvent, ce type d'intervention est effectué sans égard aux impacts négatifs de cette taille sur la santé, la développement et l’architecture de l’arbre. Bref, en matière d’émondage, même si c’est l’homme qui règle la note, c'est très souvent l'arbre qui en paie le prix.

 

EXEMPLES D'INTERVENTIONS RAISONNÉES EN ÉMONDAGE

 

1.LE RETRAIT DE BRANCHES D'UN DIAMÈTRE RAISONNABLE

Plus le diamètre d’une branche coupée est important, plus longue en sera la cicatrisation au niveau du tronc. Parallèlement, le compartimentage de la zone de carie à l'intérieur du tronc sera aussi plus complexe. Dans certains cas, par exemple lorsque l’on coupe une branche charpentière aussi grosse, ou presque aussi grosse que le tronc lui-même, la formation du bois de guérison scellant la plaie devient impossible.

Ce type d' intervention affecte la résistance mécanique de l'arbre, altère sa capacité à se nourrir par la photosynthèse (le pourcentage de masse raméale et foliaire supprimée ne pouvant plus capter la lumière du soleil) et prédispose les tissus vivants du tronc nouvellement exposés à l'insolation: les tissus du tronc qui ont toujours été protégés du soleil au fil du temps ne résistent pas à une exposition subite aux rayons du soleil, ce qui cause une nécrose des tissus du cambium et d'importantes complications.

L'outil de prévention le plus efficace pour prévenir de telles blessures sur un arbre est l'élagage de formation. Effectué tout au long du développement de l'arbre, il se traduit par le retrait préventif des branches susceptibles d'entrer en conflit avec les infrastructures qui l'entoure, des branches non hiérarchisée entrant en compétition avec le tronc central (codominance), et des branches dont l'angle d'insertion au tronc est trop faible, ou comportant de l'écorce incluse, et donc à risque de se déchirer et de causer d'importantes lésions dans le futur.

Lorsqu'une faiblesse structurelle est détectée à un stade avancé, et que le retrait de cette branche s'avère déraisonnable vu son diamètre, le haubanage représente une alternative respectueuse et non-invasive pour conserver l’arbre en toute sécurité, sans en hypothéquer l’avenir.

2.LE RETRAIT D'UN POURCENTAGE RAISONNABLE DE BRANCHES

Tout dépendant des essences, on peut envisager le retrait de 10 à 20% de branches vivantes en une seule intervention, sans générer de nouvelles croissances indésirables (réitérats) ni susciter de réactions défavorables de la part de l’arbre. Par contre, si vous devez en retirer plus pour parvenir au résultat souhaité, il est primordial d’échelonner les interventions sur 2 ou 3 ans pour limiter le stress causé par le retrait de toutes ces branches.

Le retrait d’un trop grand nombre de branches en une seule intervention cause des blessures importantes aux tissus vivants du tronc, et au bois à l'intérieur du tronc (zones de carie), expose le système vasculaire à certaines pathologies, augmente la sensibilité des arbres à des attaques par les perturbations biotiques et prive évidemment l’arbre d’une partie de sa capacité à faire de la photosynthèse.

Une intervention aussi sévère peut aussi causer rapidement le dépérissement de l'arbre. Pour assurer sa survie, il devra réitérer: des gourmands issus de bourgeons adventifs se déploieront verticalement et rapidement afin de remplacer l’équivalent de la surface foliaire supprimée par une surface foliaire équivalente en substance, mais pas en qualité. Et même en envisageant le retrait de ces nouvelles pousses, on ne règlera pas le problème car l'arbre en produira de nouvelles l'année suivante, et tout le reste de son existence. 

3.LA COUPE CHIRURGICALE DES BRANCHES

Pour limiter au maximum l'incidence des blessures d'élagage sur les tissus vivants du tronc, l'exposition directe à certaines maladies et la dégradation du bois à l'intérieur du tronc, toute coupe doit être effectuée de façon chirurgicale. Une coupe parfaite se traduit par le retrait de la totalité du bois de la branche sans endommager ou blesser les tissus appartenant au tronc, car ce sont eux qui produiront le bois de guérison  après l'élagage. Les 3 photos illustrent de très mauvaises coupes qui ne produiront jamais de bois de guérison: le systéme vasculaire de ces arbres est donc vulnérable aux perturbations biotiques, ce qui précipitera le déclin de ces arbres à court terme.

Par contre, une coupe parfaite permettra le compartimentage de cette carie, donc son cloisonnement à l'intérieur du tronc, dans une zone donnée, ou les agents pathogènes responsables de la carie, et la carie elle-même, seront emprisonnés par les différentes cloisons (murs) crées par l'action du compartimentage. Ainsi, l'arbre conservera sa solidité et une bonne résistance mécanique, ce qui lui sera fort utile tout au long de sa vie, et particulièrement lorsqu'il parviendra au déclin. Les 2 photos suivantes illustrent, à gauche, un bois de guérison âgé de 3 ans, presque refermé sur lui-même. Dès l'année suivante, il scellera définitivement l'accès à l'intérieur du tronc aux agents biotiques responsables de la carie du bois, tel qu'illustré sur la photo de droite.

4. RÈGLE DES APPELS-SÈVE 

Une différence importante entre l’élagage et l’émondage, c’est que les branches sont retirées complètement en élagage, au niveau du tronc, alors qu’elles ne le sont que partiellement en émondage : c’est ce que l’on appelle une coupe amincissante. Le succès de l’intervention dépend toujours du ratio diamètre de la coupe vs diamètre du nouvel appel-sève. Considérant qu’une coupe amincissante propre est toujours faite à proximité d’un bourgeon, d’un rameau ou d’une branche, cette règle veut que plus le nouvel appel-sève sera gros, plus efficace sera sa reprise par la suite. Donc, si vous amincissez seulement l’équivalent d’un an ou de deux de croissance sur une branche de 10 ans, le ratio sera bon : le nouvel appel-sève sera proportionnel à la coupe elle-même et la croissance de l’ensemble de la branche se fera normalement.

Par contre, si vous amincissez 5 ou 6 ans de croissance sur la même branche de 10 ans, le nouvel appel-sève ainsi crée sera beaucoup plus petit que la coupe elle-même, et il ne pourra à lui seul assurer la survie de la branche. 

Pour y parvenir, l'arbre devra faire appel  à des gourmands issus de bourgeons adventifs, qui se déploieront verticalement et rapidement, puisque non-hiérarchisés par la dominance apicale, et remplaceront l’équivalent de la surface foliaire supprimée par une surface foliaire équivalente en substance, mais pas en qualité. Dans bien des cas, la mort de la branche est possible et, même si elle ne meurt pas, cette même branche sera assurément victime de perturbations biotiques (insectes et maladies) lors de son dépérissement. Et puisqu'un dépérissement local mène au dépérissement complet d'un arbre, un ravalement sévère d'une branche est toujours risquée.

5. ÉCIMAGE, ÉTÊTAGE ET RAVALEMENT

Finalement, lorsqu’un aucun appel-sève n’est conservé et que l’on coupe plus de la moitié de la branche, et dans le cas présent, d'un arbre, c’est un ravalement. Bien que cette pratique ne tue pas les arbres vigoureux et reconnus pour y résister, tels l’érable argenté (acer saccharinum) et les frênes (fraxinus spp.), leur réaction énergique à cette action ne sera que de courte durée. L'architecture et le développement des arbres ainsi traités seront compromises: La plupart des essences nobles ne toléreront que quelques années cette agression et mourront par la suite.

Bien que le recours à l’émondage soit fréquemment utilisé pour contenir le déploiement des arbres, les résultats obtenus ne seront pas durables: au contraire, puisque les arbres sont génétiquement codés pour atteindre une hauteur donnée, et que la suppression de la dominance apicale stimule une croissance désordonnée et très rapide, ce n’est pas l’émondage qui les empêchera d’atteindre le déploiement que la nature à prévu pour eux. À titre d'exemple, regardez avec quelle détermination les arbres écimés par Hydro-Québec repoussent rapidement, mais d'une facon si désordonnée que l'intervention doit être répétée périodiquement pour protéger le réseau électrique.

6.PÉRIODE IDÉALE DE L'ANNÉE EN FONCTION DE L'INTERVENTION

Au Québec, comme le climat est très froid et les hivers rigoureux, les travaux invasifs pour les arbres devraient toujours être effectués du printemps jusqu’au début de l’été : les tissus du tronc qui produisent le cal cicatriciel seront très actifs en début de saison et couvriront une partie de la plaie durant l’été et, lorsque viendra l’hiver, ces tissus seront alors bien protégés. Par contre, si vous émondez en automne ou en hiver, le cal ne se formera pas et les tissus du tronc responsables de sa formation pourraient être abîmés par le froid, ce qui retardera ou compliquera le compartimentage de la carie à l’intérieur du tronc par la suite.